«La loi est puissante, mais le pouvoir du besoin est plus fort». Johann Wolfgang Goethe
L’un des arguments arméniens, dont ils se servent pour confirmer le « fait historique », et notamment « le génocide arménien», est le tribunal, qui avait lieu dans les années 1919-1920 à Istanbul après la défaite de l’Empire Ottomane dans la première guerre mondiale.
Des auteurs arméniens et certains auteurs pro- arméniens affirment, que la tenue de ce tribunal est la preuve de la culpabilité des Jeunes-Turcs au « génocide des arméniens ». On peut lire sur ce sujet les ouvrages de Vaagn Dadrian, Richard Ovannissian, Piter Balakian, ainsi que l’ouvrage de Yuri Barsegov « Le génocide des arméniens, le crime selon le droit international » connu de ses vues antiturques.
Je voudrais vous rappeler, qu’il n’y avait pas de tribunal unique, mais des « débats judiciaires » parallèles. On peut à peine appeler ces démarches de cour ou de tribunal. Il est très important de voir en détail le temps et les circonstances de la tenue de l’audience. L’Empire Ottoman avait perdu la guerre, le gouvernement des Jeunes-Turcs était tombé, les forces d’occupation avaient envahi sa capitale, et le pouvoir du sultan était transformé en gouvernement fantoche dans les mains des alliés.
Dans ces conditions, les alliés exigeaient au pouvoir du sultan de punir les coupables suite au traitement cruel avec les prisonniers de guerre et au massacre des arméniens.
La cour martiale appelée à examiner « les dossiers des Jeunes-Turcs » avait été fondée le 16 décembre 1918.
Il est à noter que les leaders principaux des Jeunes-Turcs avaient quitté le pays à ce moment. Dans la question de « punition des coupables » les alliés poursuivaient deux buts. Le premier était à justifier la propagande turcophobe, qu’ils menaient durant toute la guerre mondiale. Le deuxième consistait à éloigner de la capitale les personnes qui pourraient créer des problèmes aux forces d’occupation. Des milliers de manifestants défilaient à Istanbul, qui appelaient à la lutte armée et demandaient le départ des occupants du pays.Les alliés avaient besoin d’un procès démonstratif sur les « coupables ». Le pouvoir du sultan a été intéressé également à ce procès, car ils présentaient la menace pour la monarchie. Ce procès donnait la possibilité aux monarchistes et au sultan de régler les comptes avec ses opposants, c’est à dire avec les Jeunes-Turcs. Pourtant la position du palais dans cette question était équivoque: il essayait en même temps de régler les comptes avec Jeunes-Turcs, de complaire aux anglais et de ne pas s’opposer au peuple. Pour cela la cour avait été composée des juges et des accusateurs détestant les Jeunes-Turcs et fidèles au sultan. Afin de démontrer son attachement « au procès judiciaire juste », le 26 mars 1919 les autorités ottomanes se sont adressées à quelques pays neutres (Espagne, Danemark, Suisse, Suède et Norvège) avec la demande de convoquer deux juristes de chaque pays. Mais les alliés s’y sont opposés, craignant la révélation des faits impartials. Ainsi, la commission des juristes neutres n’avait pas été créée.
Dans son interview donné le 23 novembre 1918 au journal anglais « Daily Mail » le sultan Mehmed VI Vahideddin, devenu marionnette des alliés et en réalité prototype du maréchal Pétain (1), a déclaré qu’il avait été chagriné par le sort des arméniens, et qu’il a ordonné de commencer l’instruction et de punir les coupables. Outre cela, le sultan avait souligné que lui et son père aimaient et admiraient la Grande Bretagne. (2)
Le tribunal a exécuté une série d’arrêstation des personnes suspectées de crimes de guerre. Une partie des détenus a été exilée en Malte.
En fait, le but de l’exile de Malte n’était pas autant le désir des alliés d’enquêter sur un crime, que de les éloigner d’Istanbul et de Turquie afin d’empêcher leur participation à la résistance croissante à Anatolie. Parmi ses gens il y avait beaucoup de personnalités connues ayant un poids politique dans la société ottomane et capable de diriger la révolte contre les forces d’occupation.
Plusieurs personnes ont été écoutées au procès. Elles témoignaient contre les détenus. Il est remarquable, que les personnes donnant des témoignages en faveur des accusés n’aient pas été admises à l’audience. L’impartialité et la justesse des témoins soulèvent des doutes. Une opinion fait valoir parmi les historiens turques et certains historiens occidentaux, que les témoins avaient été ramassés par les anglais, et en partie envoyés par les gens au pouvoir et des organisations politiques associées, qui considéraient les Jeunes-Turcs comme leurs opposants.
Faute de preuves documentaires de la responsabilité des détenus, les alliés ont ouvert une instruction aux archives ottomanes, qui se sont retrouvées à leur disposition sous l’occupation. Cela ne les a pas aidés. En effet, ils n’ont pu trouver rien qui indiquerait, que le pouvoir des Jeunes-Turcs était responsable du génocide arménien ou d’autres crimes de guerre. Le patriarcat arménien d’Istanbul, auquel les alliés avaient fait appel pour révéler les « éléments de preuve » de la culpabilité des Jeunes-Turcs au génocide arménien, n’a pas pu les aider non plus. Néanmoins, on ne peut pas nier les fautes des fonctionnaires et militaires pris à part de l’empire Ottomane telles que les abus du pouvoir administratif ou le traitement dur à l’égard des prisonniers de guerre ou les personnes astreintes à la déportation. De même, les alliés n’ont pu trouver de preuves de la culpabilité des prisonniers maltes, qu’on à dû libérer peu après, car la détention et la déportation d’un groupe de personnes bien connues et leur séjour à Malte sans présentation des preuves du délit se retournaient contre les alliés. Cependant, toutes ces mesures n’ont pas été suffisantes pour arrêter le mouvement de résistance à Anatolie.
Pour sauver son image, les alliés avaient un grand besoin de coupables. Mais Ils ont dû se contenter uniquement des déclarations des « témoins ». La «culpabilité» de quelques prisonniers avait été « prouvée» sur la base de ces « témoignages» et elles ont été exécutées. Le gouverneur (kaymakam) de Boghazliyan, Mehmet Kemal avait été exécuté par pendaison, conformément au verdict du tribunal du 10 avril 1919. Ses funérailles étaient accompagnées de milliers de manifestants, organisées par les étudiants d’Istanbul, protestant contre l’injustice flagrante à l’égard de Mehmet Kemal.
La société turque avait perçu l’exécution de Kemal comme «acte de sacrifice» de la part du sultan sous la pression des alliés pour gagner les bonnes grâces des derniers.
Gunter Lewy, historien américain, professeur de l’Université de Massachusset, auteur du livre « Le massacre arménien en Turquie Ottomane: génocide disputé » (The Armenian Massacres in Ottoman Turkey : A Disputed Genocide) a abordé le sujet de la cour martiale des années 1919-1920. A cet égard, l’article du professeur Levi « La révision du génocide arménien » (Revisiting the Armenian Genocide) publié en 2005 à « Middle East Quarterly » suscite un intérêt particulier. Dans cet article Gunter Lewy critique le travail du tribunal, constatant le fait que les détenus étaient pratiquement privés de droit à la défense lors des débats judicaires. En même temps l’auteur souligne que les alliés ne prenaient au sérieux ni la cour, ni ses verdicts.
Voilà ce que le commissaire suprême britannique, Arthur Gough-Calthorpe, annonçait à Londres: «Les audiences de la cour ne sont qu’une farce et font tort non seulement à notre prestige, mais à celui du gouvernement turc aussi. (3)
L’avis d’un autre commissaire britannique, John de Robeck est intéressant aussi. «La cour est un exemple de l’échec complet et ses conclusions ne peuvent pas être pris au sérieux.» (4)
Le professeur de sociologie américain d’origine arménien, Vahakn Dadrian, auteur de plusieurs ouvrages sur le sujet du « génocide Arménien » (y compris de la cour martiale des années 1919-1920) est devenu l’objet de critique du professeur Lewy, qui l’accuse de falsification consciente des traductions et d’utilisation de l’information extraite du contexte pour faire tromper des lecteurs.
Etant professeur de sociologie, il écrit activement sur le sujet du « génocide des arméniens», et dans certains milieux il est considéré comme « expert reconnu » dans cette question.
La personnalité du professeur Dadriyan lui-même est floue. On sait, qu’en 1991 Vahakn Dadrian a été licencié avec déshonneur du collège où il enseignait, suite aux actes d’agressions sexuelles à l’égard de sa jeune étudiante de 18 ans.
Le 24 avril 1990, c’est-à-dire, le jour des manifestations arméniennes à l’occasion de l’anniversaire du « génocide des arméniens», le professeur Dadriyan à l’âge de 64 ans agressait la jeune étudiante de 18 ans. La jeune fille a porté plainte à l’administration du collège. Les débats sur l’affaire de Dadriyan ont révélé au moins quatre faits d’harcèlement sexuel de sa part en 1981. Suite à ces audiences environ 600 personnes, y compris 100 enseignants, ont signé une pétition adressée à l’administration de l’établissement éducatif demandant de les préserver des harcèlements sexuels de la part du professeur Dadriyan.
Qu’est-ce qui ce passe ? Un expert éminent pour les questions du « génocide arménien» est un vieil homme sexuellement préoccupé.
Les gens qui élèvent Dadriyan au rang d’expert du « génocide arménien» doivent avoir honte pour ce maniaque sexuel.
En mai 2009, le président Serge Sargsyan lui a décerné la prime du Président de l’Arménie pour son apport dans l’affaire de reconnaissance du « génocide arménien».
Je voudrais ajouter, que dans le sujet examiné Dadriyan nous intéresse comme auteur de quelques ouvrages, dans lesquels il décrit le Tribunal d’Istanbul.
En général, le tribunal passait dans les conditions de dérogation totale du code pénal, ainsi que des procédures juridiques élémentaires.
Nemrut Mustafa pacha, président du tribunal d’origine kurde, a joué un grand rôle dans le déroulement de la cour. Lors de la présidence de Nemrut Mustafa pacha les séances passaient à huis clos et, avec cela, on annonçait les mandats de mort juste après quelques débats judiciaires.
Pourtant, ni les alliés, ni les autorités ottomanes n’ont pu atteindre leur but au moyen du tribunal. Ont échoué les tentatives d’arrêter les protestations parmi la population contre les forces d’occupation et le pouvoir fantoche de sultan. Cependant, le pouvoir de sultan et certains milieux politiques souhaitant se débarrasser des opposants politiques, autrement dit, des Jeunes-Turcs, se sont trompés dans leurs calculs: de toute façon les Jeunes-Turcs partaient de la scène politique, cédant leurs places aux autres forces.
Malgré cela, les nationalistes arméniens ont profité abondamment de la cour martiale pour livrer aux juges des « témoins » et organiser les assassinats sanglants de certains leaders parmi les Jeunes-Turcs et des personnes officielles azerbaïdjanaises à l’étranger («Opération Némésis»). Le parti arménien «Dachnaktsoutioun» a activement participé à cette opération. L’un des terroristes arméniens, Archavir Shirakyan, a caractérisé les crimes des terroristes arméniens comme ceci: « Notre organisation n’a pas de plan d’extermination. Elle n’exécute que le châtiment des personnes qui avaient été condamnées par contumace et reconnues coupables de massacre en masse par la cour martiale de Constantinople ».
C’est derrière ces décisions de la cour martiale d’Istanbul que se cachaient les assassins arméniens, ayant organisé la chasse aux hommes.
Du côté arménien on entend très souvent la thèse, que le procès d’Istanbul n’est autre chose que l’analogon plus précoce du procès de Nurnberg. On voudrait préciser, que toutes les comparaisons du déroulement et des décisions du tribunal d’Istanbul avec ceux du tribunal de Nurnberg sont absolument incorrectes et privées de bases objectives.
Premièrement, le tribunal de Nurnberg possédait assez de matériel documentaire prouvant les crimes des nazis. Les documents et d’autres matériels qui étaient à la disposition du tribunal, justifiaient le fait de l’organisation et d’exécution du génocide des juifs en Allemagne nazie.
On ne peut pas ignorer le fait, que les juifs ne soulevaient pas de révolte contre l’état allemand. Ils n’espionnaient pas en faveur des ennemis de l’Allemagne, n’organisaient pas de sabotage en territoire allemand et d’attaques aux villages allemands et ne créaient même pas d équipes de partisans.
Bernard Lewis, historien américain, professeur de l’université de Princeton a déclaré, en comparant les évènements de 1915 à l’Empire Ottomane avec « Holocauste » : «Ce qui est arrivé aux arméniens n’a aucune analogie avec ce qui est arrivé aux juifs».
En examinant le travail du tribunal il faut tenir compte du moment et du lieu de son déroulement. Et en ce qui concerne les jugements de la cour martiale, il faut avoir en vue dans quelles circonstances, comment et par qui ils ont été donnés. Considérer les décisions du tribunal comme justifiées c’est la même chose que d’apprécier comme justes les verdicts des « trois» de Staline dans les années 1930 en URSS.
(1) Le maréchal Pétain était à la tête du gouvernement français collaborationniste.
(2) Lutfi bey « Les derniers jours du palais Ottoman » (Osmanlı Sarayının son günleri), page 448, édité à Istanbul.
(3) Calthorpe to Foreign Secretqrym aug.1, 1919, Foreign Office, 371/4174/118377.
(4) De Robeck to London, Sept. 21,1919, Foreign Office, 371/4174/136069.
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